A la fin des années 80, j’ai commencé ma collection de disques. C’était le bon vieux temps, le début des CD et l’âge de pierre de l’informatique, sans téléphones portables et des disquaires petits et grands dans tous les centres villes. Puis internet et le e-commerce a débarqué avec ses gros souliers pour tout balayer. Il m’a rendu accro, il m’a fait pousser des crocs. Sans me rendre compte je suis devenu un glouton de ma passion, xxx.com, précommandes, wishlists, livraisons à la maison sont devenus mes obsessions, un réflexe à portée de main, une drogue du quotidien…Il me fallait avoir tout de suite la nouveauté, l’édition collector limitée, le vinyle couleur numéroté.
Puis l’urgence climatique et le covid sont arrivés pour me sortir de mon cercle vicieux de consommateur insatiable. J’ai trouvé une nouvelle relation win-win, voire même win puissance 4 : Le retour à la source, au petit disquaire !! Avec quatre gagnants : l’environnement (plus de colis qui voyagent et qui se font livrer par des pauvres hommes uberisés), la vie du quartier, le disquaire et moi. Le couple de mon adolescence s’est reformé. 😊. Il profite de mes économies, moi je passe un moment agréable dans sa caverne aux trésors en discutant avec lui et en achetant ce que je vois et je touche, en découvrant des pépites sans mauvaises surprises et sans excès !
Deuxième étape de ma tournée des disquaires parisiens, Les Balades Sonores de la Goutte d’Or. A une centaine de mètres du Sacré-Cœur, au XVIIIème arrondissement à la rue Pierre Picard.
Je ne vais pas tergiverser. Je suis tombé amoureux de ce disquaire dès le premier regard, le premier contact, la première fois où j’ai franchi sa porte. Pourquoi ? La réponse est simple. Les Balades Sonores est la concrétisation de mon idéal musical, la réalisation au cœur de Paris de l’idée fondamentale de mon blog, la recherche multidirectionnelle de sons, du « écoutez de tout pour être équilibrés ».
Les Balades Sonores ont tout pour rendre heureux l’amateur le plus exigeant de musique. Dans les nouveaux locaux de la Goutte d’Or où l’espace est grand et le plafond très haut on se retrouve encerclés de surprises, d’étagères, de boîtes rangées et étiquetées de telle façon qu’on n’a qu’une seule envie. Déambuler, plonger dans chaque bac, faire défiler du bout des doigts les sélections éclectiques que nous proposent Toma, Esther et leur équipe. Une bande de jeunes très sympas et agréables, sans doute les porteurs au présent et au futur du flambeau de ce noble métier de disquaire.
Lorsqu’on rentre aux Balades Sonores – et n’importe quel disquaire - on oublie le temps qui nous manque tant (soi-disant). Lorsqu’on écoute des vinyles on n’est pas pressé, doit-on l’être lorsqu’on les achète ? Il faut être patient. Si on ne trouve pas ce qu’on recherche ce n’est pas grave, le bonheur n’est pas toujours là où on l’attend…il est installé tranquillement dans un coin du magasin, oublié au fond d’un bac, accroché comme une icône sur le mur, prêt à trouver un nouveau maître.
Longue et heureuse vie aux Balades Sonores !!
Questions / Réponses (avec Toma)
Merci tellement pour ces compliments. Cela fait très plaisir car il est parfois difficile de réaliser que Balades Sonores est en effet 'généraliste', mais pas généraliste-exhaustif-catalogue.
Notre ADN est le même depuis le début, depuis l'ouverture de nos magasins en janvier 2012 et même depuis nos premières 'balades' et rencontres avec le public, de manière itinérante, avec stands sur les concerts et festivals: nous proposons avec Esther (et nos équipes) une offre diversifiée mais sélective, en créant le maximum de passerelles entre les genres, les époques, les notoriétés et les pays.
Pour se faire, nous faisons grandir nos bacs de manière très irrationnelle et pas assez calculée au gré de nos coups de cœur du moment, du passé; et surtout et toujours suite aux échanges avec nos 'clients' qui ne cessent de nous faire découvrir des choses.
Notre comptable et notre banquier ne cessent de sonner la sonnette d'alarme quant au danger que représente un référencement si éclectique et massif.
Nous peinons à trouver le juste équilibre entre raison et passion.
Mais quand c'est la passion qui t'anime depuis 15 ans, c'est toujours très dur d'entendre les sirènes du grand capital.
Et pour parvenir à cette offre large mais sélective, nous travaillons avec des dizaines de distributeurs français et étrangers, mais aussi autant de labels et d'artistes.
La tendance du 'retour' (bien qu'il n'ait jamais vraiment disparu) du vinyle se confirme. Et au-delà des espérances, et au-delà des effets de mode. C'est plutôt un retour au 'vrai', à des valeurs de 'reprendre' du temps pour soi et les arts, et à des valeurs de transmission, d'échange et de partage. Et cela ne concerne pas que le vinyle, car le CD, la K7, le DVD, les magazines et les DVD se vendent aussi chez nous.
Les prix ont flambé ces 3 dernières années, mais dans des proportions très limitées chez nos chers labels indépendants. Les majors ont comme d'habitude cette triste tendance à vouloir capter le maximum de marge quand un produit fonctionne. Grave erreur, comme l'a montré le CD dans les années 2000.
Désormais, les usines proposent de nouveau des prix plus bas et des délais de fabrication plus courts: les nouvelles machines sont arrivées. La courbe offre/demande s'inverse en back-office. Et on commencera à voir les prix baisser dans les prochains mois, si nos amis des services commerciaux/marketing des majors cessent de réfléchir à court-terme. Penser à court-terme ne colle pas à la philosophie et l'éthique du vinyle. Point final.
On parle de conservation. D'héritage. De transmission. De vraies valeurs. Et ces valeurs partagées par les vrais amateurs de musique et de 'physique' sont tout à fait compatibles avec la nécessaire prise de conscience de l'urgence de 'ralentir' la consommation et donc la fabrication de produits manufacturés. Acheter, conserver et transmettre un bien physique comme un vinyle, c'est à moyen et long terme beaucoup moins impactant qu'un recours excessif aux plateformes de streaming.
Peut-être que ce sont là que des projections un peu naïves. Mais on a envie d'y croire chez Balades Sonores. C'est notamment pour cela que va se développer notre offre vinyle d'occasion.
Et vous parlez à un couple qui roule (avec modération) en PACER WAGON V8 de 79, une voiture dans l'absolu des plus polluantes, mais si on met en lumière le fait qu'elle a été construite en 1979, qu'elle a eu 3 propriétaires différents qui l'ont entretenu avant nous: il est pas débile de penser que cette voiture là fêtera ses 50 ans en ayant moins pollué infine que 5 à 10 voitures électriques sur une même période (dont on ne sait toujours pas comment gérer la masse de batteries mortes à venir), pour des ménages et/ou entreprises qui ont pris goût au leasing/switch de véhicule comme un téléphone mobile.
Le déménagement de Balades Sonores (2 petites boutiques avenue Trudaine) vers un lieu plus grand, plus fonctionnel et mieux aménagé au 9 rue Pierre Picard, au pied de la butte Montmartre, est un choix mûri et nécessaire,; qui fait partie d'une plus large restructuration de notre bébé Balades Sonores. On a envie de parler de (re)naissance. Balades Sonores est devenu trop gros pour rester artisanal et trop petit pour avoir les moyens de répondre à tous les blocages structurels rencontrés.
Après une période épuisante Covid-postCovid, une explosion de la vente en ligne, un sur-stock conséquent et mal géré (faute de place), une puissante recrudescence des vols en boutique (coucou la confiance de navigation entre 2 magasins et l'exposition de tant de bacs sur le trottoir), une gestion difficile d'un personnel nombreux, une informatisation qui peine à se terminer (coucou la version 18.6 coûteuse) et par conséquent un suivi de commandes et un conseil clientèle mis à mal... fallait réagir, et vite. Après la fermeture douloureuse de notre antenne bruxelloise, nous avons opéré ce grand déménagement progressif pour une réorganisation totale. On en voit le bout, mais le chantier n'est pas terminé.
Après l'inventaire et (enfin) l'informatisation de tous nos outils, nous pourrons espérer retrouver un rythme de croisière. Nous voulons faire moins mais mieux. Nous voulons surtout reprendre un maximum de plaisir au travail et que 100% (99% acceptable) de nos fidèles et nouveaux clients soient satisfaits ;)
Pour ce qui est du quartier, aucun regret, même si cette belle avenue Trudaine va nous manquer. La plupart des clients suivent et surtout, et c'est important: le voisinage nous accueille (pourvu que ça dure) avec beaucoup d'amour et d'entrain !