Il y a exactement 50 ans, le 18 septembre 1970, s’éteignait un des hommes les plus influents de la musique contemporaine. Jimi Hendrix était à sa vingt-septième année et seulement à sa quatrième année de carrière professionnelle. Malgré sa jeunesse il avait réussi à révolutionner son monde - celui de la guitare et des 60s – et à influencer massivement des générations futures de musiciens. L’icône Hendrix a gardé sa place au fil des années, elle est toujours accrochée très haut dans la cathédrale du rock.
Dans son œuvre il existe un concert éblouissant qui a été un jalon non seulement dans sa carrière mais dans l’histoire du rock en général. C’était les 40 minutes du trio Jimi Hendrix Expérience au festival de Monterey, le soir de clôture, à 20h le 18 Juin 1967.
Jimi était né à Seattle pendant la deuxième guerre mondiale. Du sang afro-américain et cherokee coulait dans ses veines, il ne pouvait pas avec des origines pareilles réussir aux Etats-Unis ! Il a eu la chance de rencontrer le bassiste des Animals, Chas Chandler, qui l’a persuadé de traverser l’Atlantique et d’enregistrer un single au Royaume-Uni. The place to be pour un musicien en 1966, où les Beatles et les Rolling Stones se battaient pour la couronne ! Le succès a été quasi-immédiat, les jeunes étaient fous de lui, les grandes stars aussi.
Poussés par Chas Chandler (encore), pistonnés par Paul McCartney et Andrew Oldham – le manager des Stones de l’époque -, la Jimi Hendrix Expérience va traverser l’Atlantique dans l’autre sens pour un concert unique, un one shot. Une courte prestation dans le premier festival pop, le père (ou la mère) de tous les festivals, à Monterey en Californie.
Monterey ce n’était pas la « guerre » de Woodstock. Il n’y avait pas de boue, de drogues à profusion, d’hélicoptères qui rôdaient. Il n’y avait pas de jeunes accrochés sur les échafaudages de la scène géante. La scène était modeste, il y avait des sièges tout autour et un public qui se tenait bien comme il faut. Jimi avec Mitch Mitchell son batteur génial et Noel Redding (son bassiste moins génial) avaient longuement répété leur prestation. Ils étaient prêts pour leur coup (d’état), pour voler la vedette aux cadors dont ils devaient assurer la première partie – Buffalo Springfield, les Who et les Mamas & Papas - .
Leur playlist était composée de neuf morceaux. Elle oscillait entre la douceur de Hey Joe, Like a Rolling Stone, The Wind cries Mary et la ferveur de Killing Floor, Foxey Lady, Rock me Baby, Can you see me, Purple Haze. Ils étaient coiffés comme des afros, habillés comme des princes fous avec leurs chemises aux couleurs pétantes et froufrous. Ils ont joué comme des dieux. Jimi a fait son spectacle en jouant avec ses tripes, ses dents, derrière le dos, en exhibant son instrument comme un satyre son sexe. La facilité avec laquelle il jouait ses notes et il chantait (chewing-gum à la bouche !) était déconcertante. Il a poussé tout le public à se mettre debout. Il a fini avec Wild Thing et une des scènes les plus marquantes de l’histoire du rock…A genoux devant sa guitare, en extase, avant de l’asperger d’essence, la bruler et la casser violemment.
La théâtralité et (à moindre mesure) la musicalité de ce concert n’a jamais été égalé depuis. Le cours de l’histoire aurait été sans doute différent si cette nuit de septembre 70 il n’était pas mort, étouffé dans son vomi, sacrifié sur l’autel du rock. Mais sa mort violente était inévitable. Elle était écrite, prédite le jour où il a sacrifié sa guitare à Monterey. Comme Jim Morrison lorsqu’il chantait « The End » à ses débuts ou Kurt Cobain avec « I hate myself and I want to die ». C’est le destin des membres du club des 27. La mort était leur ombre, ils s’étaient débarrassés de cette peur humaine de la fin pour en faire une force motrice, une source d’inspiration et de génie.