Je ne suis pas un adèpte des compilations. Elles sont souvent de nature commerciale, apportent peu de nouveautés et denaturent les morceaux de leur veritable contexte, leur album. Seules les compilations qui reunissent différents artistes autour d'un thème précis peuvent échapper à cette règle. La compil des Inrocks Psychédelisme fait partie de ce groupe. Elle apporte une nouvelle vision, plus globale de la musique psychédelique, une catégorie souvent méconnue et fourre-tout.
Cette musique s'apparente à une déformation. Comme la lumière qui se décompose au contact d'un prisme, le psychédelisme est une transformation sonore qui a un effet rêveur, plannant chez l'auditeur. On est face à un mutant qui a été approprié par plusieurs genres (principalement rock, mais aussi pop, electro, soul, funk, ethnique). Qui a connu son heure de gloire à la deuxième moitié des 60s et qui refait surface au 21ème siècle après avoir continué à muter dans le sous-sol musical pendant plus de trois décennies !
On voyage dans le temps et l'espace via ce coffret, avec son livret illustré de 50 pages, ses 2 CD et 30 morceaux. On débute en 1966 au berceau (San-Francisco) et on finit à Brooklyn dans les années 2000, en passant par Londres, le Brésil, l'Allemagne, la France (pays du camembert électrique!). Des groupes connus (Electric Prunes, Velvet Underground, Love, Traffic, Syd Barrett, Temptations, Can, Primal Scream, MGMT, Stone Roses, Animal Collective) sont mis à côté d'artistes inconnus (Gravenhurst, Headless Heroes, Vibracathedral Orchestra etc) pour former une playlist d'une cohérence etonnante ! Et on retrouve ainsi le dénominateur commun, le psychédelisme, qui se forme à partir de révérberations, de distorsions, d'echos, d' instruments exotiques et autres artifices sonores.
Comme tout voyage psychédelique celui-ci est particulièrement riche et vaut le détour. Mis à part les sons délicieux, on peut apprendre beaucoup de choses :
Qu'Ennio Morricone, en dehors de ses thèmes célèbres, a écrit beaucoup de morceaux psychédéliques pour des films erotiques ou d'épouvante...écoutez les soundtrack de "Cosa avete fato a Solange?" ou "Lizard In A Woman's Skin" (traduit en français par "les salopes vont en enfer"!!) et vous verrez (ou plutôt vous entendrez) une autre facette du Grand Ennio !
Ou encore qu'il existait un excellent groupe psychédélique anglais dans les 60s nommé Nirvana. Un duo greco-irlandais qui fusionnait avec brio rock-pop-jazz-latin et musique classique que Kurt Cobain et sa bande ont dû indémniser pour utiliser leur nom...et qui était beaucoup plus proche du nirvana que son homonyme de Seattle !