La voix est le plus bel instrument de musique ! Le seul vivant, invisible et bien caché comme l'âme de son joueur. Le plus facile à appréhender et le plus difficile à faire évoluer. Parmi tous les chanteurs, une toute petite poignée a une longueur d'avance sur les autres. Un don de la nature que tous les autres arrivent à approcher au bout d'années de travail et d'efforts.
Cecile McLorin Salvant a ce don, perceptible à la première écoute de son dernier double album Dreams & Daggers. Il a été enregistré au Village Vanguard, un des temples du jazz new-yorkais.
On a du mal à croire qu'une chanteuse de jazz aussi jeune, puisse être dotée d'une telle profondeur, maturité, modularité, technicité. Sa palette vocale est tellement développée qu'elle peut exprimer un spectre de sentiments très large. Notre voix s'estompe, notre machoire se décolle, nos oreilles se dressent de plaisir face à cette voix tantôt grave, douce, enragée, caline, rieuse, joueuse avec son public. Le batteur, bassiste et pianiste qui l'accompagnent sont etincéllants, inspirés sans aucun doute par les directions de la franco-américaine plus à l'aise dans une salle de concert que dans un studio !
J'ai eu la grande chance hier d'être invité à son showcase aux fameux studio d'enregistrement de Saint Germain, à Paris. Elle n'avait pas besoin de me convaincre de son grand talent et sa voix exceptionnelle. Elle m'a convaincu par sa présence, son aisance scénique, la communion avec son groupe et son public. J'ai croisé son regard malicieux, je l'ai vu se mettre sur les pointes de ses rangers argentés pour mettre plus d'effet à sa voix, j'ai senti de près son aura et son charisme. Bref, j'ai été - et je suis - sous le charme d'une étoile montante de la musique du 21ème siècle...