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♯  About Good Music  ♯

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La musique est une nourriture ... rock, soul, hip-hop, world, classique, jazz, electro, blues, reggae, folk .... Ecoutez de tout pour être équilibrés !


Queen - Innuendo (1991)

Publié par Christos sur 29 Septembre 2020, 09:01am

Catégories : #Pop - Rock

Queen - Innuendo (1991)

  Il y a quelques jours on m’a posé une question bien embarrassante. Quels sont les 10 meilleurs disques de ma collection (que je prendrais avec moi sur une île déserte) ? J’étais coincé, je n’avais pas de réponse. Il y en a tellement…Si la question portait sur un seul album, la réponse aurait été évidente ! Innuendo de Queen, le chant de cygne de Freddie Mercury. Un album vertigineux qu’on écoute comme on contemple un ciel étoilé une belle nuit d’été. Un album méconnu à qui on a collé à tort une étiquette sombre, triste et mélancolique. Un album très sous-estimé par les fans, le large public et les critiques.

  Pourtant Innuendo contient toute l’essence de Queen. Tous les ingrédients qui ont fait l’identité et le succès du quatuor : polymorphisme musical, paroles nobles, hits à la pelle, rocks pour les arènes, astuces & surprises sonores, humour et auto-dérision londonien, orchestrations parfaites, artwork et clips éclectiques. Avec en plus une voix qui était à son sommet et pas à son crépuscule. La voix hors norme d’un homme mourant de 44 ans qui avait puisé dans toutes les réserves de son corps très diminué pour atteindre une puissance et une maîtrise inouïe.

Queen - Innuendo (1991)

  Les sessions d’Innuendo ont démarré en Mars 1989 pour finir en Novembre 1990, à Londres et à Montreux. Les quatre reines auraient pu piocher dans le catalogue des morceaux écartés de The Miracle et le compléter (en 1988-1989 une trentaine de morceaux avaient été enregistrés et seulement une quinzaine avaient vu le jour !). Ils ont préféré faire un dernier effort de composition, mener une dernière danse. Ils savaient que leur chanteur était au bout, ils devaient le garder vivant en le faisant chanter, tel était son souhait. Brian May et Roger Taylor, les deux membres fondateurs de Queen – guitariste et batteur - qui avaient recruté Freddie Mercury et John Deacon en 1971, ont porté le projet sur leurs épaules.

  Tous les morceaux étaient crédités au nom de Queen (une habitude acquise depuis Miracle) mais il était clair que Freddie était l’ombre de lui-même et John, le bassiste, était trop affecté par l’état de santé de son pote. Freddie et John avaient à priori des caractères et vies contraires mais au fond ils étaient timides tous les deux et très proches. Le plus vieux du groupe avait pris le plus jeune sous sa protection et l’avait poussé à voler de ses propres ailes, à mettre en œuvre ses idées et à écrire des chefs d’œuvre. (Et le plus jeune, pour rendre hommage à son mentor et ne pouvant pas supporter un chanteur remplaçant, a quitté le navire après la mort du frontman…mais ça c’est une autre histoire)

Queen - Innuendo (1991)

   Douze morceaux composent la playlist d’Innuendo, douze coups de canon pour les oreilles. L’ouverture et la clôture sont magistrales ! Au début le très zeppelinien Innuendo, une rhapsodie à la gloire de l’homme et sa volonté de liberté. A la fin The Show Must On, un hymne pour la vie. Entre les deux une large palette de sentiments et de mélodies caractéristiques du son Queen : Deux ballades poignantes (These are the days of our lives et Don’t try so hard). Un vaudeville (I’m going slightly mad) si cher au chanteur et un clin d’œil à leurs débuts. All God’s People, un rock symphonique-gospel co-écrit avec Mike Moran (l’homme derrière le piano du projet Barcelona de Freddie). Quatre rocks entrainants, puissants et heavy (Headlong, The Hitman, I can’t live with you et Ride the wild wind). Une chanson dédiée au chat préféré de Freddie, Delilah. Et Bijou, une déclaration de mariage instrumentale avec la Red Special (la guitare fabriquée par Brian), qui parle au début et à la fin et laisse Freddie au milieu faire son solo vocal.

   Le choix des faces B des quatres singles était particulièrement pertinent. Lost Opportunity était surprenant, un blues chanté par Brian pointait pour la première fois son nez dans leur catalogue. Queen Talks étaient des paroles des quatre membres mises bout à bout pour nous faire sourire et nous montrer qu’il y avait de la joie et de la bonne humeur au studio malgré tout. Keep yourself alive (leur premier single) clôturait la boucle qui avait commencé vingt ans plus tôt en glissant un petit message subliminal d’espoir… Qui ne croit pas au miracle de la vie tant que la mort ne vient prendre l’être cher ?? Et le délicieux Mad the Swine, un inédit sorti des archives du premier album nous replongeait à leurs débuts avec la voix juvénile du messager des dieux (Hermès alias Mercury) nous racontant qu’il ramènera le tonnerre, la lumière du soleil et la pluie pour tous les gens de la terre, qu’il marchera sur l’eau comme avant - sans scandales cette fois -, qu’il aidera les humbles, les faibles, les croyants, les aveugles et toutes les créatures petites et grandes...

Queen - Innuendo (1991)

  Les illustrations colorées et adaptées de Grandville, un illustrateur et caricaturiste français du XIXème spécialisé dans l’imagerie animale, est l’enveloppe picturale d’Innuendo. Le très énigmatique jongleur d’univers de la pochette résume très bien son contenu. On est face à l’album de Queen le plus profond et philosophique en termes de paroles. Le concept de volonté, moteur des êtres vivants cher aux philosophes allemands du XIXème, est omniprésent. Le pessimisme du début avec ses lueurs d’espoir passe par une critique très fine des religions et autres barrières de l’esprit pour aboutir finalement à un optimisme éclatant : « My soul is painted like the wings of butterflies, fairytales of yesterday will grow but never die, I can fly – my friends ».

Au fil de l’écoute et des mots, on comprend mieux l’allégorie du jongleur…On jongle entre les différentes représentations de nos mondes, en souriant et en prenant les choses avec un peu de légèreté (la légion d’honneur a été remplacée à la lithographie originale par une banane 😊) mais en gardant toujours en tête qu’on doit aller chercher la clé de notre bonheur au plus profond de nous :

« You can be anything you want to be,

Just turn yourself into anything you think that you could ever be,

Be free with your tempo, surrender your ego, be free to yourself... »

Queen - Innuendo (1991)

  La mort de Freddie quelques mois après la sortie d’Innuendo, le 24 Novembre 1991, a marqué au fer rouge cet album. Il n’a pas pu se débarrasser de son contexte sombre pour être apprécié à sa juste valeur. Le fantôme de Freddie et la cause de sa mort – le sida - l’ont hanté. Ses dernières images au visage rongé par la maladie et la peau sur les os du clip « These are the days » jetaient et jettent une ombre malsaine, pitoyable sur lui. Bref, Innuendo a cristallisé toute la tragédie de Queen.

  Pourtant ce n’est pas du tout ce que cet artiste génial et amoureux de la vie aurait voulu ! La pitié, la tristesse, les sentiments noirs étaient à l’opposé de son apparence extérieure et son monde intérieur. Il n’avaient aucune place dans le monde gai et amoureux de Queen que lui-même avait en grande partie façonné.  Je suis persuadé qu’Il aurait voulu qu’on écoute son dernier bébé comme Sheer Heart Attack, A Night at the Opera, A Day at the Races ou News of the World. Comme un chef d’œuvre de la première période. Comme un retour aux sources. Comme la dernière et plus belle danse d’un groupe qui avait atteint sa destination finale.

Queen - Innuendo (1991)
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P
Bonjour, <br /> <br /> Bel article. Je vous joins les traductions des chansons de Queen, avec documentation et histoire, que j'ai faites :<br /> http://www.rocktranslation.fr/tag/queen/<br /> <br /> Pierre
Répondre
C
Joli travail Pierre ! Merci pour le lien ... au fait vous êtes sûr que le refrain de Killer Queen n'a jamais été joué en concert ? Je l'ai entendu plus d'une fois :-)

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